We spent such a beautiful moment at the Conference in June listening to Petah Coyne. Each person who ever heard Petah Coyne knows that she's an amazing storyteller!
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Je suis profondément reconnaissant à Petah Coyne dont la personnalité hors du commun et la découverte de son œuvre m’ont inspiré cet article. Lors de sa conférence au mois de juin dernier à Provincetown, pour la 17ème Conférence Internationale de l'Encaustique, je lui avais promis un article en français à propos de son travail et le voilà. Chose promise, chose due.
Je tiens à remercier chaleureusement Miku Sekimoto, son assistante, pour son aide précieuse et sa disponibilité au milieu d’un agenda chargé en installations pour Petah Coyne cet été. Elle m’a ensuite mis en relation avec Eve O’Brien, chargée de presse
et communication de la Galerie Lelong & Co à New York, pour les droits de
reproduction et de représentation des images des œuvres présentées ici.
Un grand merci à elle également. De tout cœur merci.
Prologue
La scène se passe à Provincetown, petite ville du Massachusetts aux Etats-Unis, située sur un bras de terre au large de Boston, où a lieu tous les ans la Conférence Internationale de l’Encaustique depuis 2007. Provincetown ! Une petite ville, un village presque, loin de l’agitation des grandes villes américaines. Pas de buildings, justes quelques ravissantes maisons de bord de mer et des hôtels avec piscine. Dans la rue le matin on se salue, on se dit bonjour amicalement en se souhaitant mutuellement une bonne journée. Pour cette deuxième année où je reviens à la Conférence, la première fois étant en 2022, je dois dire que je me sens un peu chez moi. Une ambiance que l’on ne trouve nulle part ailleurs, une atmosphère unique où l’art est partout, se mêle jusque dans la brise légère qui parcourt les rues colorées par les drapeaux de la communauté Gay et Lesbienne, dans le soleil et le ciel bleu de cette extrémité ouest du Cape Cod, que demander de plus ?
Nous sommes le soir dans une galerie de la Commercial Street pour un vernissage. L’exposition Three Visions concerne le travail de trois artistes : Joanne Mattera qui a créé la Conférence, Cherie Mittenthal directrice du centre artistique Castlehill de Truro et Christine Aaron, artiste majeure travaillant à la cire et à l’encaustique.
Petah Coyne entre accompagnée d’un groupe d’amies artistes rencontrées le jour même à la Conférence. Je dois avouer qu’avant d’arriver à la Conférence je ne connaissais encore rien du travail de Petah Coyne et nous comprendrons mieux pourquoi dans cet article. L’ambiance est détendue autour du buffet de crackers et de tomates cerises. Je me joins au petit groupe. Il y a beaucoup de gaieté à cet instant, on est heureux d’être là tout simplement, de discuter avec tous les artistes venus de différents endroits de la planète spécialement pour la Conférence et aussi, faut-il le dire, pour être à Provincetown en ce début du mois de Juin.
Petah Coyne au visage rayonnant et pleine d’énergie est là avec nous. Elle attrape une amie par le bras et elle sort avec son groupe pour aller manger dans un restaurant de la ville. Je sors également de la galerie et je quitte le groupe pour me rendre à un autre vernissage, l’exposition Singularities, The Wax Monotype dont Debra Claffey est la curatrice. On ne sait où donner de la tête et la programmation artistique toujours actuelle est riche et variée à Provincetown.
Je ne me doutais pas à cet instant que j’allais entendre le lendemain l’une des plus belles histoires qu’il m'ait été donnée d’entendre sur une vie d’artiste, celle de Petah Coyne, lors du Keynote qu’elle consacrait en tant qu’artiste invitée à la Conférence.
Ce premier article en français consacré à Petah Coyne présente cette histoire que j’ai eue l’honneur d’entendre de la bouche même de cette artiste majeure de la culture américaine et dont le travail n’a jamais été exposé en France. En voici les grandes lignes, présenté par l’artiste lors de sa conférence à Provincetown l'été dernier.
Bienvenue dans le monde poétique, déroutant et captivant de Petah Coyne
Je vous souhaite bonne lecture et bon voyage !
© Petah Coyne
Courtesy Galerie Lelong & Co., New York
Atelier de Petah Coyne à New York, 2022
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Petah Coyne est né en 1953 à Oklahoma City, elle vit et travaille à New-York. Son travail se situe dans les domaines de la sculpture et de la photographie présentant des imposantes installations où sa maîtrise de nombreux matériaux de toutes sortes, organiques ou non, semble sans limite. Il n’est donc pas étonnant que la cire, qu’elle utilise de façon abondante dans certaines de ses sculptures, soit présente dans son travail et c’est pour cela qu’elle est présente ce matin à la Conférence en tant qu’artiste majeure invitée.
Petah Coyne débute alors sa Conférence et prononce alors tout de suite une phrase qui me marque « Our background make us unique » qui pourrait se traduire par « Notre vécu fait de nous un être unique ». Elle parle alors de son enfance durant laquelle elle a connu de nombreux déménagement, une particularité où je peux me reconnaitre également, son père étant Officier dans l’armée. Elle en a gardé une capacité d’ouverture vers les autres et le monde qui l’entoure. Elle est passionnée par les livres et les histoires qu’ils contiennent. Alors qu’elle a cinq ans sa mère lui dit un jour en regardant un banc de baleines au large d’Honolulu à Hawaï « Quand tu fais de l’art tu peux mentir autant que tu veux !». Cette phrase lui sert alors de guide pour le reste de sa vie tout en nous avouant sur un ton humoristique qu’elle découvrait alors que l’histoire Moby-Dick d’Herman Melville était bien meilleure que ses histoires à elle !
C’est ainsi que virent le jour ses premières installations avec des poissons morts, sa série DEAD FISH, que Petah ramenait chaque jour dans leur appartement, après être allée chercher sa matière première créatrice dans les épiceries de la ville. Des centaines et des centaines de poissons nous dit-elle….
© Petah Coyne
Courtesy Galerie Lelong & Co., New York
Sans titre #9, 1982 (détail)
A New-York elle travaille chez Chanel le jour et la nuit elle élabore ses sculptures de Poissons Morts. Elle indique que pour elle c’était une véritable addiction à l’époque, d’acheter ces poissons pour les sauver avant que quelqu’un ne les mange. A cette même période (1978-1979) elle travaillait également pour un hôpital à Boston en rendant visite à des patients en phase terminale. Elle parlait avec eux et les écoutait. De ce contact avec la réalité et avec les patients elle puisait son énergie pour la création de ses oeuvres. (interview par Lynne Tillman pour le Magazine BOMB en 2002).
Sans titre #21, 1982, installation dans les rues de Tribeca à New York.
A ce moment de la conférence elle se rend compte que nous ne voyons pas les différentes photos qu’elle nous projette sur l’écran vidéo suite à une erreur technique. Fou-rire général dans l’assistance. Elle ajoute « C’est de l’art conceptuel ! ». Nous étions tellement captivés par son histoire que nous ne pensions même plus à un support visuel.
Puis le mal est réparé et nous pouvons enfin voir les fameuses installations avec les Poissons Morts, DEAD FISH. Tout ceci prend alors un sens nouveau pour nous.
L’utilisation des poissons morts prenait alors des proportions de plus en plus imposantes pour donner naissance à des œuvres monumentales comme c’est le cas ici avec cette œuvre de 1985.
Untitled #155 (Portrait of Sister Elisabeth Throckmorton), 1985
(Untitled #192) (Untitled #164)
Media:
Wood, steel, photograph, dead fish (wrapped), rubber fish, hay, tar,
mud, cloth, paint and resin 180 x 288 x 96 inches (457.2 x 731.5 x 243.8
cm.)
Photo Credit: Petah Coyne
© Petah Coyne
Courtesy Galerie Lelong & Co., New York
Sans titre #155 (Portrait de Soeur Elisabeth Throckmorton), 1985 (Sans titre #192) (Sans titre #164)
Untitled #155 (Portrait of Sister Elisabeth Throckmorton), 1985
(Untitled #192) (Untitled #164)
Media: Wood, steel, photograph, dead fish (wrapped), rubber fish, hay, tar, mud, cloth, paint and resin 180 x 288 x 96 inches (457.2 x 731.5 x 243.8 cm.)
Photo Credit: Petah Coyne
© Petah Coyne
Courtesy Galerie Lelong & Co., New York
Sans titre #155 (Portrait de Soeur Elisabeth Throckmorton), 1985, (Sans titre #192) (Sans titre #164)
D’une manière générale, Petah Coyne parle de son travail avec humour sur un ton détaché mais nous sentons bien ici qu’elle fait preuve d’une très grande détermination dans la réalisation de ses différents projets et que rien ne pourra la faire dévier. Elle travaille de façon instinctive, intuitive comme sa mère le lui a enseigné. Faire confiance à ses instincts.
Chaque personne ayant déjà assisté à une conférence de Petah Coyne sait qu'elle a un don incomparable pour raconter les histoires, son histoire. Un mélange d'humour et de regard réflexif sur son oeuvre.
Concernant ses sculptures Petah Coyne ne se limite pas à l’utilisation d’une matière. Elle utilise aussi bien la cire, le verre, du sable noir, du plâtre, des matériaux recyclés ou des matières organiques comme le crin de cheval. Pour des raisons pratiques de traduction, et afin de ne pas dénaturer l'oeuvre de Petah Coyne, j'ai traduit uniquement les titres des oeuvres en français en laissant la liste des nombreux matériaux utilisés en anglais.
Voici cependant une liste non exhaustive des matières que Petah Coyne utilise dans sa création :
Différents types de grillages, des cables, de la corde, de la peinture acrylique, des pigments, du papier de riz, de la colle, des écrous, des fleurs en soie, des épingles à chapeau, des rubans, des serviettes en papier....ou encore l'utilsation de la taxidermie dans ses oeuvres récentes.
Son travail dans l’utilisation de toutes sorte de matériaux, de matières organiques ou non me font immédiatement penser à cette définition de Matière Vibrante, la Vibrant Matter de la philosophe américaine Jane Bennett. Ce matérialisme, cette vitalité présente dans le métal ou toute autre matière. Cette vie présente dans la matière, une vie non-organique. Un écho que je peux trouver également dans l’œuvre géologique colorée de l’artiste Laura Moriarty qui utilise également la cire.
Comme toute grande artiste elle possède cette capacité à transformer et à s’approprier la réalité dans son œuvre.
Sur son site Internet les œuvres sont ainsi regroupées sous la dénomination HAIR (cheveux), WAX SCULPTURES (sculpture de cire), PLASTER (plâtre) ou encore BLACK SAND (sable noir), GLASS (verre). Ses différentes séries sont en fait composées d’une multiplicité de matières.
Après la série DEAD FISH des années 80 voici des extraits de ses différentes sculptures des années 90 jusqu'à aujourd'hui.
Ici de sa série BLACK SAND SCULPTURE
Untitled #689, 1989-91
Media: Meshed chicken wire, horsing fence wire, tomato fence wire, steel, wire, cable, paint, black sand, rope, polymer, talc 125 x 69 x 76 inches (317.5 x 175.3 x 193 cm.)
© Petah Coyne
Courtesy Galerie Lelong & Co., New York
Sans titre #689, 1989-91
© Petah Coyne
Sans titre #695 (Fantome/Première Communion), 1991
Puis de sa série HAIR
Ou de la série PLASTER
Untitled #978 (The Whitney Women (Gertrude and Juliana)), 1999-2000
Media: Plaster, plaster bandages, fiberglass cast statuary figures, acrylic paint, drywall, chicken-wire fencing, wire, wood
144 x 206 x 53 inches (365.8 x 523.2 x 134.6 cm.)
© Petah Coyne
Courtesy Galerie Lelong & Co., New York
Sans titre #978 (Les Femmes Witney (Gertrude et Juliana)), 1999-2000
Voici également la photo d’une Performance, datant de 1992, pour laquelle Petah Coyne avait demandé à une artiste de danser avec son œuvre.
Photo Credit: Petah Coyne
© Petah Coyne
Courtesy Galerie Lelong & Co., New York
Sans titre #715, 1992 dans "La Belle et la Bête: Six Beautés" (Sans titre #715C)
Ici quelques oeuvres de sa série WHITE WAXED SCULPTURE
Sans titre #785, 1994
Sans titre #1074 (Les Couleurs de Kate), 2002
Dans sa dernières série WAX SCULPTURE de 2005 à aujourd'hui elle utilise également la taxidermie avec l’apparition de paons empaillés dans son travail comme c’est le cas ici dans cette œuvre.
Sans titre #1458 (Marguerite Duras), 2019-20 (Photographie d'Installation prise au National Museum of Women in the Arts, 2023)
Je remercie encore chaleureusement Petah Coyne de m’avoir mis en relation avec son assistante Miku Sekimoto ainsi qu’avec Eve O’Brien de la Galerie Lelong & Co à New-York afin de pouvoir présenter ici les images de ses œuvres. Avec cette sélection de photos j’ai essayé d’être le plus proche possible de l’œuvre de Petah Coyne en donnant une vision la plus large possible. Il reste bien sûr de nombreuses oeuvres à découvrir.
Pour plonger plus encore dans le monde de Petah Coyne, retrouvez son actualité et l'ensemble de son travail sur petahcoyne.org
Un grand merci pour votre lecture,
Vincent Delrue